Qu’est-ce que l’ordinateur quantique ?

quantique

Comprendre la « course au quantique » qui agite États et entreprises

Temps de lecture estimé : 6 minutes

Chère lectrice, cher lecteur,

Septembre 2019. Google annonce avoir atteint la « suprématie quantique ».

Les médias font écho. Ça semble important. Et si vous n’y connaissez rien, ça fait très science-fiction.

Peu à peu, on décrypte : Dans les labos de Google, il y a un ordinateur qui s’appelle Sycamore.

Sycamore est particulier : ce n’est pas un ordinateur classique, mais un ordinateur quantique.

Et par « suprématie quantique », Google veut dire que Sycamore a résolu un calcul a priori inatteignable pour un ordinateur classique.

Dans ce cas précis, Sycamore aurait réalisé en 3 minutes un calcul qui aurait pris 10 000 ans à un supercalculateur normal.

Dans la foulée, coup de théâtre : IBM conteste le résultat annoncé par Google.

D’après eux, un supercalculateur classique aurait pris 2 jours et demi, et pas 10 000 ans, pour effectuer la même opération que Sycamore.

On ne sait toujours pas qui a raison…

Parce que le problème, avec le calcul quantique, c’est qu’on peut y arriver une fois – et ça ne garantit pas qu’on puisse le refaire dans la foulée.

Ce qu’on sait, en revanche, c’est que tout le monde veut du quantique.

Car le premier pays ou la première entreprise à maîtriser pour de bon la suprématie quantique aura un avantage à peine concevable.

Pour que vous compreniez, je dois vous rappeler comment marche l’informatique « classique ».

Les 0 et les 1

L’informatique, c’est des 0 et de 1.

Tout le monde le sait, mais personne ne comprend ce que ça signifie.

Pour résumer, le 0 signifie « faux » et le 1 « vrai ». On appelle ça le système binaire.

Les machines numériques traitent les informations sous forme de suites binaires.

Ces suites de 0 et de 1 forment des messages ou des instructions. Plus la suite est longue, plus le message est complexe.

Chaque chiffre binaire (0 ou 1) est un bit. C’est l’unité de base de l’information. Un groupe de 8 bits s’appelle un octet.

Et chaque octet correspond à une instruction ou à un caractère.

C’est la façon la plus simple, pour une machine, d’appréhender la réalité.

Surtout, c’est ce sur quoi repose l’informatique moderne. Des 0 et de 1, à partir desquels on construit tout le reste, les langages de programmation, qui eux-mêmes construisent les programmes, les logiciels et les sites…

Il faut imaginer tout ceci comme un continuum depuis le langage de la machine, ultra-basique, composé de 0 et de 1 car limité par une réalité physique (des interrupteurs ouverts ou fermés), vers le langage humain, infiniment plus complexe.

C’est là qu’intervient l’informatique quantique.

Quantique, ça veut dire quoi ?

Avec l’informatique quantique, l’unité de base n’est plus le bit (le 0 ou le 1) mais le qubit.

Un qubit est la version « quantique » du bit.

qubit

Et si vous connaissez un peu la physique quantique, vous me voyez venir…

Pour ceux qui n’y connaissent rien, pas de panique.

La physique quantique, c’est (pour résumer) la physique de l’infiniment petit. Les lois qui régissent le comportement des atomes et des particules.

Car il faut bien comprendre une chose : les lois de la physique classique et les lois de la physique quantique ne sont pas les mêmes.

Des choses qui nous semblent impossibles à notre échelle sont tout à fait possibles à l’échelle quantique.

C’est là toute la difficulté.

Il faut accepter que les « règles du jeu », les lois du réel, changent et se courbent à mesure que l’on zoome jusqu’aux composants les plus essentiels de la matière.

En clair : vous avez beau n’être qu’une immense somme d’atomes, vous n’obéissez pas aux mêmes règles que l’atome seul.

C’est tout bon ? Poursuivons.

En physique quantique, une de ces fameuses lois insaisissables, c’est la superposition des états.

Si vous connaissez le chat de Schrödinger, c’est de ça qu’il s’agit.

Bien sûr, le chat ne peut pas être vivant ou mort à la fois, car un chat n’est pas un objet quantique… mais un électron, si.

Mathématiquement, certaines particules peuvent être dans plusieurs états contraires à la fois.

Et c’est là que tout se rejoint : l’informatique quantique, c’est une informatique où les qubits remplacent les bits.

Or, un qubit n’est pas soit un 0 soit un 1…

C’est un 0 ET un 1.

La superposition des états.

Une révolution pour tous nos secteurs d’activité

Un qubit, c’est un bit qui exploite la physique quantique pour stocker plusieurs informations simultanément au lieu d’une seule.

Une fois qu’on a compris ça, on a compris la théorie.

En pratique, cela signifie que l’ordinateur quantique n’a pas les mêmes limites que l’ordinateur classique.

Il peut effectuer des opérations à une vitesse infiniment supérieure à l’ordinateur classique.

Et cette puissance de calcul illimitée ou presque va changer la face de l’humanité.

Voici quelques exemples :

L’Intelligence Artificielle (IA)

Une IA peut tout apprendre… à condition qu’on lui donne assez de puissance de calcul. C’était, jusqu’à présent, sa limite fondamentale. Les algorithmes lourds demandent énormément de puissance de calcul. Mais la puissance combinatoire de l’informatique quantique fait exploser ces limites.

C’est la clé pour une IA qui s’approchera plus que jamais de l’intelligence humaine.

La cryptographie et la cybersécurité

Les mots de passe et les transactions sécurisées fonctionnent via des algorithmes de cryptage. Un ordinateur classique peut, dans certains cas, déchiffrer ces algorithmes… mais un ordinateur quantique les fait sauter en une seconde.

Avec l’ordinateur quantique, les méthodes actuelles de cryptage deviendront obsolètes. Il faudra réinventer un « cryptage quantique » pour sécuriser la moindre transaction.

La santé

La modélisation moléculaire est sans doute LE domaine qui bénéficiera le plus de la révolution quantique.

Pour créer des médicaments, les scientifiques doivent examiner la structure exacte d’une molécule pour évaluer toutes ses interactions avec d’autres molécules.

Dans un système complexe comme le corps humain, le nombre d’itérations et de simulations est gigantesque… C’est pourquoi il est impossible pour les ordinateurs classiques de tout simuler, même pour des molécules de base.

La capacité des ordinateurs quantiques à se concentrer sur les 0 et les 1 simultanés permet de cartographier les molécules les plus complexes. Cela permettra aussi d’accélérer la compréhension des maladies et d’améliorer la précision des traitements.

On identifiera plus rapidement des protocoles de traitement ciblés, on comprendra où échouent certaines thérapies… En bref : on pourra « craquer le code » de la médecine.

D’autres domaines comme la météorologie, l’agriculture, la production d’engrais et la logistique seront bien évidemment impactés… C’est l’humanité toute entière qui changera avec la maîtrise de l’ordinateur quantique.

Mais pour l’instant, c’est d’abord une course effrénée.

Qui sera le premier pays quantique ?

« Rendre l’humain aussi puissant qu’un dieu »

C’est ce que répondent certains chercheurs quand on leur demande ce que va permettre l’ordinateur quantique.

Vous comprenez pourquoi États et grandes entreprises se jettent dans la bataille…

Car le premier pays qui aura à sa disposition la puissance de calcul quantique pourra :

  • Percer tous les systèmes de sécurité et toutes les transmissions sécurisées des autres pays
  • Innover à une vitesse inatteignable sans calcul quantique… et ces innovations accélèreront elles-mêmes la vitesse d’innovation du pays, ce qui cassera toute compétition.
  • Mettre au point molécules, médicaments, armes, engrais… pour révolutionner tous les pans de l’activité humaine

Comme beaucoup d’autres révolutions, le quantique promet des percées spectaculaires.

Un âge d’or pour certains, une dystopie technologique pour d’autres…

Mais d’abord beaucoup de fantasmes, qui ont aiguisé l’appétit des États :

  • La France investit 1,8 milliards sur 5 ans pour son « Plan Quantique ».
  • L’Allemagne, 2,6 milliards.
  • La Chine, 10 milliards.
  • Les USA, 1,2 milliards.
  • Les Britanniques, 1,3 milliards.
  • Russie, Israël, Canada, Inde, Japon… sont aussi dans la course.

Cela dit, il reste encore de nombreux défis techniques à résoudre.

L’ordinateur quantique est une machine fragile

Pour qu’ils fonctionnent correctement, les qubits ne doivent surtout pas interagir avec leur environnement.

C’est ainsi qu’IBM, à l’origine du premier ordinateur quantique, l’a pourvu d’une cuve d’hélium liquide et d’un équipement cryogénique pour faire fonctionner les qubits aux portes du zéro absolu (à -273,15°C) pour éviter toute interaction avec l’extérieur…

Car la moindre perturbation casse la « magie » quantique : lumière, champ magnétique, agitation thermique… peuvent provoquer une « décohérence », c’est-à-dire la perte des propriétés quantiques des qubits.

Or, les qubits doivent être en état de cohérence pendant le calcul, pour exploiter leurs propriétés quantiques. Et plus il y a de qubits, plus la décohérence arrive vite.

Autant vous dire qu’il reste du travail.

Mais la promesse est alléchante : à 50 qubits, un ordinateur quantique atteint la « suprématie ».

À 100, on révolutionne la modélisation moléculaire et la science des matériaux

À 300, on cartographie toutes les informations depuis l’origine de l’univers… et on comprend la « pensée de Dieu », pour reprendre le mot d’Einstein.

Pour l’heure, les entreprises les plus avancées du secteur quantique sont toutes regroupées dans une zone ultra-sécurisée, au sud de Chicago… 

On la surnomme la Zone 52, et des opportunités d’investissement exceptionnelles s’y cachent.

Amicalement,

Marc Schneider

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Julius
Julius
2 années il y a

encore une vaste fumisterie qui va apporter non pas le bonheur aux humains ….mais toujours plus de folie dans le cerveau des psykos qui inventent tout ca pour transformer en esclaves hybrides la majeure partie de l’humanite (on voirt bien ce que Billoute est devenu un Pédo pervers ami du célebrissime détraqué Eipstein qui veut vaxxniquer toute l’humanité pour implanter ces chips) ….cracker la Pensée Divine (hahaha) avec des ordis quantiques ….quelle naivité ? quelle sottise ? quel délire ? achetez vous des camisoles ca sera bcp plus efficace !!!!

Roland LANG
Roland LANG
2 années il y a
Répondre à  Julius

m’en fou, j’ai 71 ans, je serai mort avant que ça sorte

garcia
garcia
2 années il y a

bonsoir à vos services, merci pour vos explications dans la lettre électronique de ce jour sur la course au quantique qui agite les états et les entreprises. c’était un peu trop technique pour moi mais j’ai compris en partie ce que cela voulait dire.
cordialement
pierre garcia

Siouxville
Siouxville
2 années il y a

Bonjour
Pour la 1ére fois j’ai presque compris l’informatique quantique.
Encore un pas vers la connaissance absolue, qui nous permettra un jour de nous affranchir de notre dépendance à Dieu.

Jean-Marie Barth
Jean-Marie Barth
1 année il y a

Bonjour
Merci pour cet article intéressant, je n’avais jamais entendu parler de l’ordinateur quantique, mais pour être honnête je n’ai pas compris ce qu’étaient les qubits et leur fonctionnement. De toutes façons vu mon âge je ne connaîtrais pas sa mise en œuvre.
J’ai noté cependant une petite erreur ou bous avez indiqué quantique au lieu de classique dans ce paragraphe… Ce qui change complètement l’argumentation :
« Dans un système complexe comme le corps humain, le nombre d’itérations et de simulations est gigantesque… C’est pourquoi il est impossible pour les ordinateurs quantiques de tout simuler, même pour des molécules de base. »
Cordialement

stefano
stefano
1 année il y a

quel est le but ,la finalité sauvez l’espèce humaine, ou préparer les futurs martiens, car concrètement, que cela puisse servir a mieux comprendre pour allez encore plus loin why not mais le plus loin est infini,alors qu’il serait plus simple de ralentir, mais c’est déjà trop tard.mais vos article sont intéressants.

patrick LAILLET
patrick LAILLET
1 année il y a

Bonjour,

Belle analyse des enjeux de la course à l’ordinateur quantique. J’ai une question ; Pourquoi la Nature et l’Univers sont-ils de nature quantique ? Sans répondre à cette question, toute argumentation est vaine.
Peut-on affirmer que connaître toues les interactions liant les atomes entre eux permet de connaître pourquoi existent ces interrelations ? Le Comment n’est pas le Pourquoi.
Et, en quoi un ordinateur quantique permettra-t-il de répondre aux questions fondamentales ; D’Où venons-nous ? Qui sommes nous ? Qu’est-on venu faire sur la planète Terre ? et Où irons-nous après la mort de notre corps de chair ? Peut-on en Vérité penser qu’un ordinateur, même quantique, dont les données qu’il détient, proviennent des Etres qui ne savent pas répondre à ces questions, permette un jour de répondre à ces questions ? Si tel est le cas, en pure logique formelle, cela veut clairement dire que les inventeurs de l’ordinateur quantique : soit ne veulent pas répondre à ces questions, soit il considèrent que l’ordinateur est plus performant qu’eux, et cela pose la dernière question : Comment celui qui veut répondre à de telles questions, dont il n’a pas lui-même les réponses, espère-t-il qu’un ordinateur va les lui donner ? Autant demander de définir une couleur à un aveugle.
Face à un tel constat, on ne peut que s’interroger sur les véritables intentions des inventeurs de l’ordinateur quantique.

Bruno
Bruno
1 année il y a

Le mot Crypter n’existe pas en français. On ne peut donc pas employer le mot cryptage. Il faut parler de chiffrement.
Certes le domaine de la cryptographie quantique avance assez rapidement, mais il ne va pas y avoir de révolution. On va passer aux algorithmes post quantiques progressivement dans les entreprises. D’ailleurs, ils ont déjà fait l’objet d’un appel d’offres du NIST (on a au moins un français dans chacune des solutions retenues), et sont de facto déjà normalisés. Si vous voulez vous y mettre, il va y avoir un deuxième tour pour de nouvelles solutions.

En revanche, il va y avoir de nouvelles sociétés créées, qui seront « post-quantique natives ». Ca a déja commencé….

J.M.V.
J.M.V.
2 mois il y a

Excellent article qui reprend bien les thèmes principaux des nombreuses conférences de Julien Bobroff. La science c’est avant tout du temps long : entre la première pensée sur l’ordinateur quantique de Richard Feynman (1979 à1981)et le premier ordinateur quantique : 40 ans.
Espérons qu’il faudra moins de 40 ans à compter de 2020 pour qu’un ordinateur quantique soit fiable et opérationnel, il reste beaucoup de travail, mais quel défi passionnant à relever…..Bravo à tous ces grands physiciens qui travaillent dans leur laboratoire chaque jour pour repousser toujours un peu plus les limites de la connaissance !!