Comment j’ai raté Normale Sup

Les renards, les hérissons et mon échec à l’ENS

Chère lectrice, cher lecteur,

J’ai raté Normale Sup.

Après 2 ans de prépa, hypokhâgne puis khâgne, j’ai raté le concours de l’École Normale Supérieure.

À l’époque, je pensais devenir philosophe ou diplomate. Passer par Normale Sup, ça m’aurait bien aidé.

Mais j’ai fait le deuil de cette carrière, et surtout j’en ai tiré une grande leçon.

J’aimerais la partager avec vous.

Mauvaise allocation des ressources

A priori, j’étais un candidat sérieux pour l’ENS.

J’avais de bonnes notes, les cours me passionnaient, j’étais insensible à la pression des classes préparatoires… Par moments, je me sentais presque marcher sur l’eau.

Autant vous dire que quand on se ramasse après avoir eu cette impression, on le sent passer.

Mais ça forge.

Le jour des résultats, surprise : non seulement je n’étais pas pris à l’ENS, mais en plus, ça ne se jouait pas à grand-chose.

J’avais de bons résultats partout sauf dans ma spécialité, la littérature anglaise.

Or, cette spécialité compte plus que le reste, avec son gros coefficient.

Aucun de mes « bons résultats » partout ne pouvait surcompenser ça.

À l’autre bout de la cour, un de mes meilleurs amis déchiffrait lui aussi son bulletin de notes… mais lui, il était admissible à Normale Sup.

« Renforce-toi là où tu es fort »

Nous avons échangé nos bulletins, et là encore surprise : à première vue, on semblait avoir la même moyenne.

La seule grosse différence, c’était l’écart entre les notes. Sur son bulletin, les notes allaient de 8 à 18, sur le mien, elles étaient toutes entre 10 et 14.

Il avait cartonné dans sa spécialité et en histoire. Tout le reste était moyen, mais peu importe : ça lui avait permis d’atteindre le seuil d’admissibilité.

À l’inverse, j’avais voulu être bon partout, mais je n’avais été excellent nulle part.

Et surtout, je n’avais pas mis mes efforts au bon endroit.

J’aurais dû travailler d’arrache-pied sur ma spécialité à gros coefficient.

Je n’aurais pas dû chercher à « grappiller » un peu partout des points supplémentaires…

J’aurais dû bétonner mes forces, quitte à colmater un peu moins bien mes faiblesses.

Toutes ces leçons que j’ai tirées m’ont servi bien plus tard, quand j’ai commencé à m’intéresser au monde de la finance.

Êtes-vous un renard ou un hérisson ?

Cet échec malheureux à Normale Sup me rappelle un livre d’Isaiah Berlin : le Hérisson et le Renard.

Le philosophe allemand fonde son ouvrage sur la phrase du poète Archiloque : le renard connaît beaucoup de choses, le hérisson connaît une seule grande chose.

Dans le contexte de la khâgne, j’avais été un renard et mon ami un hérisson.

Le hérisson s’en était mieux sorti.

Les hérissons cherchent une grande règle, un grand principe pour guider leur action et orienter leurs choix.

Les renards préfèrent la variété, les expériences multiples, même si elles témoignent de principes contradictoires ou ne sont pas articulables les unes aux autres.

Isaiah Berlin donne de nombreux exemples. Du côté des hérissons, on trouve Platon, Nietzsche ou Dostoïevski… Tandis que chez les renards, on retrouve Molière, Montaigne, Shakespeare.

Comme vous le voyez, il y a des grands d’un côté comme de l’autre… du moins dans l’Histoire de la pensée.

Car dans d’autres domaines, les résultats sont plus tranchés.

Les grands investisseurs sont des hérissons

La métaphore du renard et du hérisson est assez connue dans l’univers de la finance.

On oppose les investisseurs qui papillonnent (les renards) à ceux qui ont construit un système, avec des règles strictes pour choisir ou non d’investir quelque part.

Et les performances des uns et des autres laissent peu de doutes… Dans la plupart des cas, ce sont les hérissons qui gagnent.

Warren Buffett, par exemple, est l’archétype du hérisson. Il a construit un système pour sélectionner ses actions, avec des principes incontournables :

  • Il faut qu’il comprenne parfaitement le modèle économique de l’entreprise
  • Il faut que l’entreprise détienne un avantage concurrentiel clair et durable
  • Il faut que l’équipe dirigeante soit appréciée et digne de confiance
  • Il faut que le prix de l’action ne soit pas trop élevé

En respectant scrupuleusement ces critères, Buffett a bâti un empire, Berkshire Hathaway, et une fortune personnelle qui avoisine les 100 milliards de dollars

On pourrait arrêter cette lettre ici et conclure qu’il vaut mieux être un hérisson.

Pourtant, cette règle du « grand système » est discutable.

Être un hérisson… ou devenir un hérisson ?

Prenons deux légendes du sport de haut niveau : Tiger Woods (golf) et Roger Federer (tennis).

Woods a commencé le golf à l’âge de 2 ans. Il s’est concentré sur cette discipline toute sa vie, jusqu’à devenir le meilleur. C’est un pur hérisson.

Federer, à l’inverse, a fait du squash, du ski, de la lutte, du football… et du tennis, évidemment.

Il a déclaré que cette variété de sports lui a permis de construire ses qualités athlétiques et sa condition physique générale…

Mais il n’a vraiment atteint le haut niveau qu’en se concentrant sur le tennis au détriment du reste. C’est un renard qui est devenu hérisson.

D’ailleurs, si l’on revient à Warren Buffett, on observe la même chose : avant d’être aussi rigide sur ses critères d’investissement, il a investi sur de multiples valeurs douteuses, des sociétés qui se vendaient trop cher, des métaux précieux…

C’est son passé de renard qui lui a permis de devenir un excellent hérisson.

Ce qui nous amène à la vraie conclusion de ce message : il n’est pas « mieux » d’être un hérisson qu’un renard, et le monde ne se divise pas strictement en ces deux catégories…

Mais si vous voulez exceller quelque part, vous devez devenir un hérisson.

Le point commun à tous ceux qui nagent au dessus de la masse

Les « grands » de ce monde étonnent par la rigueur de leur mode de vie.

On ne compte plus les exemples de grands patrons qui se lèvent à 4h du matin… et qui ne manquent pas une occasion de s’en vanter, d’ailleurs.

Mais au-delà du personal branding, il faut garder en tête que ça n’est pas un hasard.

Les gens qui se lèvent tôt ne sont pas prédisposé à devenir des leaders mondiaux.

En revanche, les leaders mondiaux ont tous construit un système pour devenir les meilleurs.

Ce système concerne à la fois leur activité en elle-même, mais aussi leur hygiène de vie globale, pour tirer le maximum de leur corps et de leur esprit.

Le grand écrivain Haruki Murakami se lève à 4h du matin, écrit pendant 5 ou 6 heures puis court 10 kilomètres, nage, écoute de la musique… et se couche à 21h.

Si vous voulez exceller, vous n’avez pas le choix. Vous devez construire un système.

Si vous voulez devenir riche, vous ne pouvez pas investir à l’aveugle.

Vous devez affiner votre compréhension des marchés, bien sûr, et pour ça faire des erreurs… donc vous pouvez avoir été un renard.

Mais vous ne deviendrez jamais riche qu’avec une stratégie de hérisson : rigoureuse, dépassionnée, orientée vers un objectif précis, fondée sur des critères solides.

C’est ce que je fais personnellement, avec l’aide d’un groupe de recherche financière basé aux États-Unis.

Vous pouvez découvrir notre stratégie en cliquant ici.

Amicalement,

Marc Schneider

La Lettre Argo Éditions

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Paul Hynézien
Paul Hynézien
3 mois il y a

Bonjour Marc,
Sans connaitre cette fable très intéressante, j’ai suivi un parcours de type renard vers hérisson. J’ai commencé des opérations financières d’investissement il y a 13 ans, en étant complètement débutant. Après avoir exploré des techniques très compliquées et aléatoires (options, futures, actions…), je me suis recentré sur l’investissement en actions, en m’inspirant des principes de Warren B. J’y passe beucoup moins de temps.

jm faivre
jm faivre
3 mois il y a

Merci pour cet article renard vs hérisson, approche intéressante et pertinente.
Bonne fêtes de fin d’année.
Bien à vous.
Jim.