Billet Dan Ferris du 06/04/2024

Chère lectrice, cher lecteur,

Voici LA question que l’on me pose le plus souvent lorsque je dis qu’un actif, ou qu’un marché particulier, est très cher après avoir beaucoup augmenté :

“Dan, si les actions sont très chères en ce moment et que leurs perspectives de hausse sont limitées, qu’est-ce qui pourrait les faire chuter ?”

Et bien sûr, on me pose aussi la question inverse lorsqu’un actif, ou qu’un marché en particulier, est très bon marché après avoir beaucoup baissé.

La plupart des gens n’arrivent tout simplement pas à accepter l’idée simple qu’un actif trop cher (ou trop bon marché), est une raison suffisante pour décider de le vendre (ou de l’acheter).

Ils ont besoin d’un signe précis pour envisager que la tendance en cours va changer.

En d’autres termes, ils demandent : quel est le catalyseur qui va faire que les prix vont se retourner dans l’autre sens ?

Et la vraie réponse est : je n’en ai aucune idée.

Pour être franc, je ne me préoccupe pas vraiment des catalyseurs.

C’est comme pour les prédictions de l’avenir, personne ne sait vraiment comment les déterminer…

 

J’admets donc que ce message n’est pas dans mes habitudes…

Car aujourd’hui, je tenais justement à vous partager un catalyseur convaincant qui vient de me tomber dessus.

Selon le Wall Street Journal :

“Un nombre record de titulaires de comptes épargne retraite ont effectué des retraits anticipés de leurs comptes l’année dernière pour faire face à des situations d’urgence financière.”

Aux USA, des millions d’investisseurs achètent de façon régulière et “passive” des ETF qui répliquent les grands indices boursiers comme le S&P 500.

L’investissement dit “passif” signifie que les gens achètent leurs actions sans se référer aux fondamentaux des entreprises sous-jacentes (c’est de l’achat “automatique”).

Et au cours des dix dernières années, les épargnants ont placé environ 4’000 milliards de dollars dans des ETF américains à gestion passive (donc gérés sans réflexion), soit une augmentation de 376 % sur cette période.

 

Mais tant que tout le monde continue à acheter, il n’y a pas de problème, n’est-ce pas ?

Bien sûr…

Mais les gens n’achètent jamais indéfiniment.

À un moment donné, les ventes commencent.

Et même des ventes en apparence minimes peuvent être plus que suffisantes pour faire reculer le marché.

C’est là qu’il faut se rappeler de l’article du Wall Street Journal que j’ai cité plus haut.

Si les titulaires de comptes épargne retraite continuent à faire leurs retraits d’urgence, cela pourrait faire passer les flux d’investissements passifs du mode “achat” au mode “vente”.

Et nous ne sommes peut-être pas très loin de ce seuil de bascule

Comme je l’avais déjà souligné en septembre dernier :

“Lors de la panique boursière du Covid, en mars 2020 – l’un des moments les plus effrayants de l’histoire des marchés – un rapport de Vanguard a révélé que seulement 1 % des ménages américains avaient complètement vendu leurs actions…

C’est à se demander ce qui se passerait si 2 % des ménages vendaient toutes leurs actions ? Ou 5 % ? Ou 10 % ?…”

Les différents types de comptes épargne retraite détiennent un total d’environ 38’400 milliards de dollars à la fin de 2023.

Imaginez que seulement 5 à 10 % de ces comptes commencent à être vendus à peu près au même moment…

Cela représenterait entre 1’900 et 3’800 milliards de dollars d’actions qui se retrouveraient sur le marché en même temps, à la recherche d’acheteurs (soit une part assez importante des quelque 55’000 milliards de dollars que représente la capitalisation boursière totale des actions américaines, dont la plupart sont de petites entreprises peu liquides, avec un volume quotidien moyen de transactions assez faible).

Et n’oubliez pas que les vendeurs seraient également pressés de vendre, puisqu’ils auraient besoin de récupérer ces liquidités pour leur vie quotidienne.

Donc ils continueraient à vendre, quelle que soit l’ampleur de la chute du marché qu’ils seraient en train de créer…

 

Il ne faudrait donc probablement pas que beaucoup d’investisseurs appuient sur le bouton “vendre” pour faire passer la machine passive du mode “marché haussier” au mode “marché baissier”

L’algorithme d’un fonds passif est programmé ainsi : “Quand je reçois 1 dollar de liquidités, j’achète 1 dollar d’actions”.

Mais si la situation s’inverse, cela devient : “Quand on me demande 1 dollar de liquidités, je vends 1 dollar d’actions”.

Donc pour un ETF, le marché est considéré comme un simple compte bancaire.

Il y dépose de l’argent quand il le peut et il en retire quand vous en avez besoin.

Et plus que jamais, les épargnants américains ont besoin de leur argent aujourd’hui.

Une spirale baissière pourrait donc s’emballer, car plus les prix des actions chutent, plus il faut vendre d’actions pour transformer 1 dollar d’actions en 1 dollar de liquidités…

Pour l’instant, ce n’est qu’un petit pourcentage des épargnants qui effectuent des retraits d’urgence.

Mais si ce chiffre continue d’augmenter, il pourrait un jour inverser la tendance haussière que l’on connaît sur les marchés depuis les deux dernières décennies.

Je sais que cela peut sembler improbable…

 

Mais je ne suis pas le seul à imaginer ce scénario catastrophe…

Le gestionnaire d’actifs Ruffer, basé au Royaume-Uni, se targue d’un rendement de 8,1 % par an, net de frais, depuis 29 ans.

Il privilégie la préservation du capital à long terme et gère environ 28 milliards de dollars d’actifs.

C’est donc une société qui ne peut pas se permettre de dire des choses qui inciteraient ses clients à tout vendre et à partir à l’aventure.

Pourtant…

Elle tire la sonnette d’alarme dans son rapport de 2024.

Henry Maxey, co-responsable des investissements, évoque la probabilité d’une baisse soudaine et potentiellement importante du marché :

“Nous craignons aujourd’hui que le retournement ait plus en commun avec 1987 qu’avec n’importe quelle autre crise de ces 30 dernières années.”

Il parle ici de la plus forte baisse en une journée de l’histoire des marchés, que l’on connaît sous le nom de “Lundi Noir”.

L’indice Dow Jones avait alors chuté de près de 22 % en une seule journée (le 19 octobre 1987).

Maxey est la seule personne, à part moi, que j’ai entendue s’inquiéter publiquement de la possibilité d’une baisse importante du marché boursier en une journée… et de la question de savoir si les coupe-circuits des bourses seraient vraiment aussi efficaces qu’on nous le dit.

Car les bourses américaines disposent de trois coupe-circuits automatiques, qui ont été adoptés à la suite du krach de 1987 :

  • le premier se déclenche lorsque le S&P 500 chute de 7 % en une journée. Dans ce cas, les transactions sont interrompues pendant 15 minutes si la chute a lieu avant 15h25, sinon elles ne sont pas interrompues.
  • le deuxième se déclenche si le marché chute de 13 % en une journée. Les transactions sont également interrompues si la chute a lieu avant 15 h 25, sinon elles ne sont pas interrompues.
  • le troisième se déclenche si le marché chute de 20 % en une journée. Dans ce cas, la bourse est fermée, quelle que soit l’heure de la journée.

 

Ces “filets de sécurité” sont là pour donner un peu de temps de réflexion aux investisseurs pour comprendre ce qui ne va pas, les aider à retrouver la tête froide, et les forcer à ne pas réagir de manière excessive dans un mouvement de panique irrationnelle.

L’idée d’avoir ces protections automatiques est raisonnable.

Mais, comme le souligne Maxey, les coupe-circuits ne peuvent pas empêcher un krach massif de se produire sur plusieurs jours.

En d’autres termes, ce n’est pas parce que vous fermez la bourse un lundi parce qu’elle s’effondre de 20 % que le marché ne sera pas à nouveau en baisse de 20 % supplémentaires le mardi matin à l’aube.

Certes, je ne prétends pas connaître tous les rouages complexes des logiciels des ordinateurs qui gèrent les grandes places boursières.

Et je ne connais pas non plus toutes les réglementations qui s’y appliquent…

Mais ma crainte d’une baisse massive en quelques jours est une position théorique qui me permet de réfléchir au pire scénario afin de m’y préparer au mieux.

Cela me guide pour faire la sélection des entreprises que je mets dans mon portefeuille.

Elles doivent d’abord reposer sur des fondamentaux solides dans leur secteur.

Mais EN PLUS elles doivent présenter un ratio de valorisation attractif (c’est-à-dire ne pas être surévaluées).

C’est cela qui me permet de viser le plus gros potentiel de hausse, tout en ayant un risque limité à la baisse en cas de krach imprévu du marché.

Je vous dévoile ICI le nom de l’une de ces entreprises qui remplit tous ces critères et qui promet de rendre riche ses actionnaires à long terme

Bon investissement,

Dan Ferris

Eagle Point, Oregon

 

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