Chère lectrice, cher lecteur,
Merci, Adam Aron.
Et merci, AMC Entertainment, d’avoir une fois de plus tenu ses promesses…
Quand parfois je ne sais pas quoi écrire pour mon billet, je sais que je peux toujours me tourner vers quelques sources pour leur capacité à me fournir constamment des choses que j’ai du mal à croire.
Et AMC Entertainment est en tête de cette liste.
J’ai souvent écrit sur cet exploitant de salles de cinéma en difficulté.
Et honnêtement, qui peut me blâmer de cela ?
La société semblait se diriger vers la faillite au début de l’année 2021.
Mais jusqu’ici, ce n’est pas une histoire passionnante, les faillites sont monnaie courante.
C’est ensuite que cela devient original…
De petits spéculateurs ont commencé à publier sur Reddit des articles sur les « mèmes-actions ».
Et ils ont créé un énorme « short squeeze » sur AMC Entertainment, Bed Bath & Beyond, GameStop et quelques d’autres.
En conséquence, le cours de l’action d’AMC Entertainment a été multiplié par 31 au cours des cinq premiers mois de l’année 2021.
Au cours d’une période particulièrement folle qui s’est terminée par un pic le 2 juin de la même année, il a augmenté de plus de 400 % en l’espace d’une quinzaine de jours.
N’oublions pas que les fermetures d’usines pendant la pandémie de COVID-19 ont complètement décimé l’activité de cette entreprise qui brûle des liquidités. Et pourtant, sa capitalisation boursière a brièvement atteint 30 milliards de dollars en juin 2021.
Même si l’action d’AMC Entertainment s’est rapidement retirée de ces sommets insensés, elle a conservé une capitalisation boursière de plusieurs milliards de dollars suffisamment longtemps pour vendre des milliards de dollars de nouvelles actions ordinaires à ses actionnaires sans méfiance (qui se nomment eux-mêmes « singes »)…
Et pour réinvestir 28 millions de dollars en mars 2022 dans 22 % de Hycroft Mining, qui possède une mine d’or fermée dans le Nevada.
L’action de Hycroft a chuté d’environ 77 % depuis lors.
Et bien sûr, les investisseurs d’AMC Entertainment ont souffert encore plus que cela…
Aujourd’hui, l’action de la société se négocie à près de 99 % en dessous de son record historique d’environ 625 dollars par action.
Tous ceux qui ont acheté des actions au cours des deux dernières années sont sous l’eau, car l’action atteint de nouveaux planchers historiques presque tous les jours :
C’est une situation terrible. Mais en tant qu’auteur d’une lettre d’information financière, elle s’est avérée un excellent sujet d’analyse pour moi à de nombreuses reprises…
Et je n’ai pas pu résister au dernier moment incroyable d’AMC Entertainment…
Je l’ai déjà dit, mais je doute que la société soit en mesure de vendre encore beaucoup plus d’actions (si tant est qu’elle en vende).
Elle a déjà dilué ses actionnaires d’environ 97 % depuis 2019. Il est donc difficile de croire qu’ils ont encore de l’appétit pour de nouvelles actions…
Mais cela n’a pas empêché la société de vendre tout ce qu’elle pouvait aux singes encore fidèles…
AMC Entertainment dispose désormais de sa propre gamme de pop-corn à déguster chez soi. Elle aura bientôt sa propre ligne de chocolats gourmands. Et ces derniers jours, le PDG Adam Aron a lancé l’idée d’un vin fin et d’une bière artisanale portant la marque de l’entreprise !
C’est ce à quoi nous devrions nous attendre, n’est-ce pas ? Après tout, l’entreprise est clairement dans le secteur des films, de l’or, des snacks et de l’alcool…
Pour moi, tout cela est devenu encore plus bizarre lorsque Aron a proposé les noms « Château Simian » et « Saint Simian » pour le vin et « Great Ape Ale » pour la bière. Dans un message publié sur le site Web de médias sociaux Twitter, M. Aron a déclaré que ces noms qui font allusion aux singes étaient « en l’honneur de nos investisseurs particuliers ».
En tant que groupe, les “singes” ont perdu près de 29 milliards de dollars sur les actions d’AMC Entertainment…
Je me demande donc s’ils se sentiront honorés par les dernières trouvailles de l’entreprise. Peut-être regarderont-ils la bouteille de vin « Château Simian » en se disant qu’Aron et les autres dirigeants de l’entreprise ne font que se moquer d’eux à ce stade.
Je me demande combien de vin et de bière ils vont vendre…
Si vous me lisez, Adam, arrêtez ça…
Vous avez arrosé ces gens de manière épique, encore et encore, pendant plus de deux ans… Vous les avez brutalisés.
Accordez-leur une pause et arrêtez de vous moquer d’eux.
Arrêtez de faire des choses pour « honorer » les investisseurs dont vous avez brûlé l’argent à hauteur de dizaines de milliards en valeur de marché.
Par ailleurs, Adam, vous devriez faire attention…
Si les singes arrêtent un jour de croire à vos histoires, ils risquent de se débarrasser de vos actions.
Et cela entraînerait une chute encore plus importante.
Les actionnaires d’AMC Entertainment ont fait preuve d’une loyauté sans faille. On ne sait pas ce qu’ils pourraient faire s’ils devenaient des ennemis parce que la société les a dilués et leur a pris leur argent en même temps…
Si je faisais partie du conseil d’administration d’AMC Entertainment – avant de démissionner immédiatement – j’enverrais un mémo demandant aux autres membres s’ils ne pensent pas qu’Aron devrait être remplacé.
J’aurais débarqué Aron dès qu’il a acheté la participation dans la mine d’or…
C’est à ce moment-là que le grand investisseur Peter Lynch aurait probablement accusé Aron de « surdiversification ».
Lynch a inventé ce terme et en a longuement parlé dans son ouvrage classique de 1989, “One up on Wall Street”.
Il s’agit du cas où une société acquiert des entreprises dont elle ne connaît rien, sans se demander si ces actifs profiteront réellement à la stratégie d’investissement globale, en espérant devenir un conglomérat diversifié.
Dans son livre, M. Lynch donne plusieurs exemples de cette époque, dont la société General Mills.
À un moment donné, ce fabricant de produits alimentaires conditionnés a possédé des restaurants chinois, des restaurants italiens, des steak houses, le fabricant de jouets Parker Brothers, les fabricants de vêtements Izod et Eddie Bauer, des agences de voyage et le fabricant de vêtements de golf FootJoy…
Une chaîne de cinémas en difficulté et surendettée qui investit 28 millions de dollars dans une mine d’or désaffectée est un parfait exemple de surdiversification.
Car je peux vous promettre qu’Aron ne connaît absolument rien à l’exploitation des mines d’or.
Ne me demandez pas pourquoi les entreprises se diversifient ainsi. Je ne le sais pas et Lynch non plus. Comme il l’a écrit dans “One up on Wall Street” :
“Je n’ai jamais compris le pourquoi de tout cela, sauf peut-être que les dirigeants d’entreprise trouvent plus excitant de racheter de petites sociétés, aussi coûteuses soient-elles, que de racheter leurs actions, ou d’envoyer des chèques de dividendes, ce qui ne demande aucune imagination.”
Lynch a décrit la surdiversification comme une maladie des entreprises rentables qui gaspillent tout l’argent qu’elles gagnent.
Si l’on considère les choses sous cet angle, AMC Entertainment n’entre pas dans cette catégorie. La société n’a pas réalisé de bénéfices annuels depuis 2018. Et sa dernière période de rentabilité constante s’est achevée en 2016…
Mais pour moi, AMC Entertainment est un exemple encore pire de surdiversification…
Car elle n’a pas gaspillé ses bénéfices en achetant 22 % d’Hycroft. Non, elle a gaspillé le capital des petits investisseurs après leur avoir vendu davantage (et de plus en plus) d’actions.
Après avoir terminé mon billet d’aujourd’hui, je devrais écrire une note de remerciement à Aron…
Bien sûr, les singes perdent beaucoup d’argent à chaque fois qu’Aron fait la une des journaux. Et cela ne s’arrêtera probablement pas jusqu’à ce qu’AMC Entertainment rejoigne Bed Bath & Beyond en faillite.
Mais pour un rédacteur de newsletter financière comme moi, c’est un cadeau qui continue d’être offert…
S’il n’y avait pas Aron et d’autres PDG cupides et désemparés, je ne pourrais pas continuer à vous avertir aussi souvent des risques qui guettent le marché.
Chaque fois qu’Aron décide d’acheter une mine d’or fermée, ou lance l’idée de nommer maladroitement une bière, ou un vin avec le nom d’un exploitant de cinéma, je peux vous signaler ce qui ne va pas et vous aider à éviter le danger.
Je ne dis pas que vous tomberiez dans le piège de ces absurdités.
Mais il est utile de souligner tous les excès de la méga-bulle dans laquelle nous sommes et de renforcer l’idée générale selon laquelle les marchés ne sont pas sûrs si l’on ne sait pas ce que l’on fait.
Merci donc, AMC Entertainment, de nous avoir tous aidés à rester sur nos gardes pendant une semaine supplémentaire.
Bon investissement,
Dan Ferris
Eagle Point, Oregon
